Un truc que j'ai commencé il y a longtemps. Jamais poursuivi.
Il se tenait là, debout, au milieu du décor, reprenant ses esprits. L’instant de la surprise passa rapidement. Encore un cauchemar. Ca ne pouvait, après tout, qu’être un cauchemar au vu de la scène. Ses pieds écrasaient le sable d’une plage qui s’étendait jusqu’à l’infini, jusqu’au brouillard qui lui masquerait n’importe quelle velléité de voir plus loin. Au bord de cette plage, mourait une mer sans vague, sans écume, noire et plate, comme un miroir s’étiolant jusqu'à l’horizon. L’air était caractérisé par sa discrétion. On l’aurait pu croire absent si un vent ne venait pas faire lentement déplacer les grains de sables au sol. Ce désert ne pouvait appartenir qu’à une seule personne : lui-même. L’homme recommençait a se perdre dans ses pensées, sans bouger le moins du monde, affichant un air apathique. Soudain, des traces de pas se dessinèrent sur le sable, devant lui. Comme si son ombre se déplaçait, lui montrait un quelconque chemin vers un but qui lui semblait encore plus, comme si son avis n’importait pas. Il se surprit à suivre les pas, les foulant avec précision. Comme lorsque les enfants piétinent uniquement les bandes blanches sur les passages cloutés. Lui, il suivait ses propres pas.
Sa marche dura un temps indéfini. Le temps n’importait pas beaucoup dans ce lieu. L’homme se mit à repenser, se demanda si, finalement, quelque chose avait de l’importance en ces lieux torturés. Alors qu’il semblait de plus en plus perdu dans ses pensées, une voix sortit du vide qui l’entourait :
« Reprends toi, ce lieu n’est pas uniquement le tien… Trop de vide serait trop lourd pour un seul être humain… »
En fait, la voix semblait sortit des flots. Mais pas seulement la voix. L’eau se souleva, puis une forme se sculpta de par celle-ci, ressemblant vaguement a un homme; Ou plutôt, une ombre d’homme.
« As-tu un nom ?
-« Oui… C’est… »
-« Je n’ai aucune envie de le connaître », coupa l’ombre, « mais sois assuré que cela a un sens que tu en aie un. Cela prouve que tu existe, véritablement. »
-« Un nom seul prouve que l’on existe ? », interrogea l’homme.
-« Cette condition est suffisante, mais pas nécessaire. Il existe de nombreuses choses innommables qui existent, pourtant... »
-« Comme... vous ? »
-« Peut-être. Peut-être pas. Le mystère reste intact. Quoiqu’il en soit, j’ai autant besoin de toi que tu as besoin de moi… »
-« En quoi aurais-je besoin de vous ? Je me supporte très bien seul. »
-« Regarde autour de toi. Ne devines-tu pas ce qui t’entoures ? Je vais t’aider… Ceci est la représentation de tes pensées… »
-« Je doute qu’elles soient aussi plates. »
-« Ce n’est pas la platitude qui importe, chacun de nous pense selon ses souhaits… Non, ce que tu devrais remarquer est entre toi et moi… »
L’homme regarda au sol. Il n’aperçut que de l’eau s’effritant sur du sable.
-« Divisé en deux. » continua l’ombre. «Voilà comment est ton esprit. Tu ne cherche que la vérité, tu ne trouve que des contradictions. Que des avis différents. Et tu es incapable de trancher, hélas. »
-« Et vous pensez connaître la vérité ? »
-« J’en connais une, en tout cas… Mais, peut-être devrais-je de la laisser apprendre par toi-même… pour commencer »
L’ombre inclina la tête. Brusquement, le vent se mit à souffler plus fort, le sable tourbillonnant dans tous les sens. L’homme plaqua ses mains devant se yeux, par un étrange réflexe. Lorsque la tempête fut calmée, un craquement de bois se fit entendre. Il se retourna, et une porte, posée au milieu de nulle part, était ouverte devant lui. L’ombre reprit la parole :
-« Mais avant que tu n’avances plus loin, J’aimerais te poser une dernière question… Penses-tu qu’une unique vérité existe, pour n’importe quoi ? »
-« C’est obligé ! Deux choses contraires ne peuvent pas être vraies ! »
L’humanoïde baissa la tête, puis commença à s’enfoncer dans l’onde.
-« Alors je comprends la signification de cet endroit. Tu peux emprunter la porte. En fait, tu n’as plus le choix. Bon voyage. »
L’ombre s’effaça dans la mer, ne laissant derrière lui que de l’eau couleur onyx.
Pourtant, l’homme n’avança pas. Il restait pensif, puis se parla à lui-même.
« Mais, si j’existe de par mon nom, quel est le votre ? En fait, qui êtes vous ? »
Sachant pertinemment que ces questions se résoudraient par elles-mêmes, à un moment ou un autre, il traversa la porte devant lui. Cette dernière se referma sur son passage, dans un claquement sourd.